Elle n’est pas médecin…
Elle connait ce mal qui la ronge depuis bien longtemps… longtemps, il était là dans son esprit... Longtemps, il a parlé pour elle.
Elle va mieux, mais on ne guérit jamais de l’anorexie, on apprend à vivre avec…
Elle a arrêté de perdre du poids, d’en reprendre… l’image qu’elle voit est toujours déformée mais elle croit les gens qui lui disent qu’elle est trop maigre…
Pourquoi est-elle la seule à voir cette graisse, ces kilos…
Sa maladie, C'est qu'elle lui manquerait presque…
Elle avait trouvé des réponses à ses questions : pourquoi moi ? Comment les crises commencent ? Comment les surmonter ? Une seule question restait sans réponse : « Y trouvait-elle du plaisir ? »
Difficile de répondre, difficile de l’avouer … et pourtant elle se souvient de ce sourire dans le coin de sa bouche…
Oui, c’est bizarre… elle avait du plaisir... du plaisir à se faire mal? En était-elle consciente sur le coup?
Elle n’était pas fière d’elle quand elle succombait à ses crises, quand elle ne maitrisait plus rien… quand elle se remplissait… Elle n'était pas fière
Mais elle était fière de cette maitrise sur son corps, c’est elle qui décidait, elle décidait d’avoir faim, elle décidait de le punir… ce corps qui pesait… ce corps dont elle était l’esclave…
Oui, elle était l’esclave de son corps, c’est lui qui l’empêchait de s’aimer, de sortir, de rire…
Elle n’acceptait aucune remarque sur son corps… et refusait qu’on l’ignore également…
Elle était si fière de cette maîtrise sur son corps… personne ne se doutait… enfin presque, et pour eux, elle inventait des mots barbares, vous savez ces maladies dont on est fière... qu'on ne cache pas.
Car elle avait honte de cette maladie…
Elle vit avec, à ses côtés... oui, elle est là... A chaque bouchée, à chaque regard dans la glace…
Elle a juste appris à vivre avec, à voir la nourriture comme un plaisir… elle trouvait du plaisir à voir les gens manger, à leur préparer à manger… elle leur enviait ça… elle qui redoutait l’alimentation
Elle aime partager ses recettes, c’est une victoire contre cette maladie qui l’a si souvent isolée…
Aujourd’hui, elle essaie de vivre, oui de vivre et non de survivre…
Elle vit... et ce qui est le plus beau c'est qu'elle a appris à en parler... Sa victoire c'est ça!